Une photo vaut mille mots, dit-on. La chaîne de supermarchés américaine Whole Foods, spécialisée dans le bio et l’équitable, a imaginé à quoi ressembleraient nos étals si les abeilles venaient à s’éteindre. L'un de ses magasins à Providence (Rhode Island) a enlevé d'une pour une certaine durée tous les produits issus de plantes pollinisées par des abeilles et autres insectes. 237 des 453 produits habituels ont disparu, soit 52% des récoltes. Parmi eux, on trouve des produits de la vie quotidienne tels que les pommes, oignons, carottes, citrons,
brocolis, avocats ou encore concombres. Un tiers de notre nourriture dépend des abeilles, rappelle la société. "Les pollinisateurs naturels sont un maillon essentiel de notre chaîne alimentaire. Plus de 85 % des espèces végétales de la terre, dont beaucoup composent les aliments les plus nutritionnels de notre alimentation, exigent des pollinisateurs pour exister. Pourtant, nous continuons à assister à un déclin alarmant de ces populations, regrette Eric Mader, directeur adjoint de la Xerces Society, une ONG qui protège les abeilles. Notre organisation travaille avec des agriculteurs pour les aider à recréer un habitat sauvage et adopter des pratiques moins intensives en pesticides. Ces stratégies simples peuvent faire pencher la balance en faveur de retour des abeilles." Le tier des colonies d'abeilles aux Etats-Unis ont été décimées lors de l'hiver 2012, selon une étude publiée le 7 mai, réalisée par le ministère de l'agriculture américain et des associations professionnelles, qui montre également les conséquences "désastreuses" pour une économie du miel, qui aux Etats-Unis pèse 30 millions de dollars. Les autorités américaines évoquent "les parasites, les maladies, les facteurs génétiques, une mauvaise nutrition et l'exposition aux pesticides", pour justifier cette hécatombe, et lespesticides sont souvent cités par les scientifiques pour expliquer la surmortalité des pollinisateurs domestiques et sauvages (bourdons, papillons, abeilles sauvages, etc.).
Le 29 avril, l'Union Européenne a annoncé la suspension pour deux ans, à compter du 1er décembre, del'utilisation de trois insecticides impliqués dans ce déclin. Ces molécules, l'imidaclopride, le thiaméthoxame et la clothianidine appartiennent à la famille des néonicotinoïdes, insecticides parmi les plus utilisés au monde en agriculture et que l'on retrouve dans des dizaines de produits tels le Cruiser, le Gaucho, le Poncho ou le Cheyenne. L'application de cette interdiction n'est pas évidente, car les substances citées persistent dans l'environnement. Mais elle est essentielle si l'on veut éviter de connaître la même réalité qu'en Chine, abordée par l'excellent documentaire Des abeilles et des hommes, où des milliers de paysans pollinisent les fleurs à la main, à partir de pollen qui leur est envoyé d'autres régions où les butineuses vivent encore.